ACTUALITE POLAIRE 2013
 

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03.06.2013 : Arctique, des plantes « hibernatus »

En arctique, sur l’île d’Ellesmere (île la plus au Nord de l’archipel arctique canadien), dans la région du glacier Teardrop, une équipe de biologistes canadiens a fait un constat surprenant.

Comme une bonne quantité de glaciers de la région, le Teardrop est en recul depuis plusieurs décennies avec une accélération marquée ces derniers temps : recul annuel de 160 cm dans les années 1960 passé à 410 cm/an depuis 2007. Le glacier a ainsi reculé de plus de 200 mètres par rapport à son apogée du “Petit Age glaciaire”, soit la fin du moyen-âge. L’espace libéré est ainsi devenu un terrain scientifique notamment pour analyser la manière dont la végétation va recoloniser la zone.

Catherine La Farge et son équipe de l’Université de l’Alberta pensaient que la vie végétale allait reconquérir le territoire grâce aux graines que le hasard y sèmerait. Mais ils ont remarqué qu’en fondant, la masse de glace avait rendu à l’air libre des plantes recouvertes durant des siècles. Complètement noircis, asséchés et racornis, celles-ci avaient l’apparence de véritables cadavres végétaux.

Cependant en y regardant de plus près et après les avoir ramenées au labo, l’équipe canadienne a pu constater que sur certaines plantes, il y avait de nouvelles branches latérales qui poussaient… A l’instar du personnage du film Hibernatus d’Edouard Molinaro, ces organismes revenaient à la vie après avoir passé des siècles dans les glaces !

Trois échantillons ont été analysés à la datation carbone 14 et le résultat confirme que ces plantes ont un âge compris entre 404 et 614 ans ; qu’ainsi, elles ont donc bien vu le jour avant que le “Petit Age glaciaire” ne provoque l’avancée du glacier.

Dans leur laboratoire, les biologistes canadiens ont réussi à faire repousser des spécimens appartenant à quatre espèces différentes de bryophytes. Contrairement aux plantes vasculaires, ces mousses et ces hépatiques n’ont pas de véritables racines ni de système pour transporter la sève.

Il a donc suffi que durant l’hibernation forcée de plusieurs siècles sous le glacier, quelques cellules aient survécu aux brûlures du gel, à l’absence de lumière et au passage du temps pour que la plante soit capable de redémarrer sa machinerie vitale.

L’absence de système vasculaire apporte un « plus » dans ce cas bien précis : Incapables de contrôleur leur teneur en eau, les bryophytes sont coutumières de mettre leurs cellules en sommeil en cas de desséchement et de se réveiller dès le retour de conditions favorables. C’est pourquoi ces plantes survivent dans l’environnement extrême de l’hiver polaire… mais de là à envisager qu’elles seraient capables de résister pendant des siècles, il y avait une très grande marge.

Avec le réchauffement climatique qui fait reculer inlassablement les glaciers et ramollit le pergélisol, selon Catherine La Farge, c’est tout un territoire qui est restitué au vivant avec un réservoir génétique inexploré qui s’ouvre à la communauté des chercheurs et scientifiques…          à suivre !